Faire mémoire du passé pour s’engager aujourd’hui
Pour accueillir la nouveauté de cette année, pour mieux nous ouvrir à l’inattendu de Dieu, nous pouvons nous appuyer sur deux évènements importants de cet été qui éclairent notre vocation à écouter la parole de Dieu et nous laisser transformer par elle.
Le 24 août, pour la Saint Barthelemy, à l’initiative du pasteur Pierrot Munch de l’église reformée de Nantes, et avec notre évêque, nous avons marché de la cathédrale jusqu’au temple. C’était un grand moment de pouvoir faire mémoire devant Dieu du grand massacre de protestants, il y a 450 ans à Paris et en France. L’humble demande de pardon, le refus que des baptisés s’entretuent, le refus de la défiance entre nous, et la proclamation de foi en la restauration de notre unité a traversé notre assemblée. Plusieurs paroissiens ont gardé au cœur la vérité de la prière et la fraternité vécues durant cette rencontre œcuménique, comme si nous goutions la joie du Père de nous voir réunis.
En cette fin d’été, notre évêque nous demande aussi de lire la lettre de 1942, de Mgr Jules Saliège (Toulouse) réagissant aux rafles des familles juives. Rappelons-nous aussi qu’en 1997, des évêques français ont demandé pardon aux juifs pour le silence de leurs prédécesseurs durant l’année 1941, lors du vote des lois du gouvernement français pour coopérer à l’inadmissible. Cet été, 80 ans après la rafle du Vél’ d’Hiv, toutes les synagogues ont voulu lire cette lettre catholique de protestation (voir plus loin). Ainsi à notre tour laissons résonner ce cri de Mgr Saliège pour éclairer notre mission dans le monde et la société.
P. Norbert Rousselle Communauté du Chemin Neuf
Lettre de Mgr l’Archevêque de Toulouse sur la personne humaine
Mes très chers Frères,
Il y a une morale chrétienne, il y a une morale humaine qui impose des devoirs et reconnaît des droits. Ces devoirs et ces droits, tiennent à la nature de l’homme. Ils viennent de Dieu. On peut les violer. Il n’est au pouvoir d’aucun mortel de les supprimer.
Que des enfants, des femmes, des hommes, des pères et des mères soient traités comme un vil troupeau, que les membres d’une même famille soient séparés les uns des autres et embarqués pour une destination inconnue, il était réservé à notre temps de voir ce triste spectacle.
Pourquoi le droit d’asile dans nos églises n’existe-t-il plus ?
Pourquoi sommes-nous des vaincus ?
Seigneur ayez pitié de nous. Notre-Dame, priez pour la France.
Dans notre diocèse, des scènes d’épouvante ont eu lieu dans les camps de Noé et de Récébédou. Les Juifs sont des hommes, les Juives sont des femmes. Les étrangers sont des hommes, les étrangères sont des femmes. Tout n’est pas permis contre eux, contre ces hommes, contre ces femmes, contre ces pères et mères de famille. Ils font partie du genre humain. Ils sont nos Frères comme tant d’autres. Un chrétien ne peut l’oublier.
France, patrie bien-aimée, France qui porte dans la conscience de tous tes enfants la tradition du respect de la personne humaine, France chevaleresque et généreuse, je n’en doute pas, tu n’es pas responsable de ces horreurs.
Recevez mes chers Frères, l’assurance de mon respectueux dévouement.
Jules-Géraud Saliège Archevêque de Toulouse, le 23 août 1942